Emmanuel Moyrand
Metavers Strategist - CEO chez AZTEQ, co fondateur et VP Chez France Meta
Bonjour Emmanuel, pourrais-tu s’il te plaît présenter ?
J’étais expert en objets d’art pendant dix ans, dans la prévention et de l’expertise pour des banques et des assurances.
Initialement, je ne suis pas tech. Ma passion c’est l’objet.
J’évoluais dans l’ancien monde, traditionnel, entouré d’experts et de gens poussiéreux : je voyais ces gens vieillir, sans aucune innovation.
2011 a été une année charnière ; en effet, pas mal de mes amis m’ont offert des bitcoins.
A l’époque, leurs valeurs étaient proches du prix d’une pizza. Il faut savoir que je ne comprenais absolument rien.
Ce qui m’a intrigué, ce n’est pas tant le Bitcoin que de voir mes amis enflammés face aux crypto-monnaies.
En France, au même moment, Pierre Paperon et Laurent Leloup parlaient du Web 3.
J’ai décidé de les contacter pour qu’ils me fassent comprendre la blockchain. Les deux m’ont répondu positivement. Pierre m’a dit au même moment : “Si au bout de deux jours, tu ne comprends pas la révolution Web 3, je ne te parle plus jamais."
Le ton était donné. Pierre m’a formé pendant deux jours pleins, j’ai cru que mon cerveau exploserait des dizaines de fois tellement les informations étaient denses.
J’ai compris à quel point la blockchain pouvait certifier la valeur numérique de l’art et j’ai décidé deux ans plus tard de créer les premières applications mobiles blockchain.
Rapidement, nous avons été nombreux et présents dans 20 pays.
Puis, je suis parti 3 mois à San Francisco, en Corée, à Dubaï. J’ai rencontré tout le monde, une nouvelle fois pour comprendre les NFT.
Quand je suis rentré, je me suis mis à créer des formations sur le metaverse.
En juin 2022, je suis passé à plus de 15 formations/mois. L’aventure Azteq était lancée, un cabinet de conseil Web 3.
L’objectif : accompagner les entreprises à créer leurs propres metaverses en respectant le cadre réglementaire et notamment RGPD.
Qu’est ce qui t’a poussé à t’intéresser au Web 3 ? Et pourquoi ?
Le Web 3 est un sujet crucial.
Le Web 2 c’est la centralisation, la captation et la monétisation de toutes nos données par un tiers.
Le Web 3 c’est la décentralisation et l’utilisateur qui redevient propriétaire de sa donnée. Et qui peut - ou pas - décider de la monétiser. En tout cas, la data de chacun n’est plus exploitée par un acteur tiers.
Le deuxième sujet c’est l’avatar ; je suis passionné par cela même si bien sûr, il faut être attentif aux potentielles dérives.
Par exemple, je travaille avec la Gendarmerie Nationale qui a déployé des gendarmes exclusivement présents dans les metaverses, ce sont les brigades du Metaverse.
Leurs rôles ? Protéger les utilisateurs des dérives qui peuvent survenir au sein des metaverses.
L’identité numérique est une problématique extrêmement importante : ma fille de 16 ans a sept avatars différents.
Quels sont tes sujets de prédilection dans le Web 3 ?
Ce que j’aime dans le Web 3 c’est son essence, son idéologie libertaire. Il faut redistribuer les cartes pour créer autre chose.
Si l’on prend l’exemple des Philippines pendant le covid : des familles entières ont réussi à survivre avec les cryptos en monétisant leur activité via Axie Affinity.
On monte actuellement un projet NFT de pommes de terre au Pérou. Il faut savoir que ce sont les Incas qui ont créé les pommes de terre.
Quand tu achètes un NFT, l’argent est directement reversé aux agriculteurs locaux. Fini la centralisation par les banques.
Les agriculteurs peuvent directement recevoir leurs revenus dans leurs poches. C’est révolutionnaire !
Concernant les enjeux climatiques / RSE, le Web 3 peut réduire l'empreinte carbone. On discute actuellement d’un projet NFT au Sahara qui serait découpé virtuellement en parcelles.
Le prix de chaque NFT vendu serait reversé à un agriculteur local qui pourrait du coup entretenir son terrain.
Là encore, on est sur un projet incroyable et envisageable sans cryptos !
Pourrais-tu stp nous parler de France Meta : quel est son rôle ?
C’est une association à but non lucratif que nous avons créée Pierre et moi.
Le projet nous tient très à cœur : nous souhaitons soutenir les initiatives francophones du monde du Metaverse pour proposer une alternative à des initiatives centralisées, et celles notamment initiées par le GAFA, je pense à Horizon.
Nous avons 1 370 adhérents qui nous ont rejoint en moins de six mois. L’idée c'est de fédérer les personnes qui souhaitent travailler dans le Web 3.
Actuellement, j’ai huit thèses sur le Metaverse.
Qu’est-ce que Metaverse College ?
Olivier de la Garde est le fondateur de Metaverse College, initialement à destination des étudiants.
Les modules collaboratifs forment les jeunes aux différents métiers du Metaverse : chef de projet (...). Une formation coûte en moyenne 10 K€.
Malheureusement ce n’est pas encore accessible pour tout le monde. On y viendra.
J’a idéveloppé la branche à destination des entreprises qui comprend notamment 12 modules (juridiques / marketing…) et plus de 100 heures de formations sur le Metaverse.
Aujourd’hui, ce sont principalement les grosses boîtes qui nous sollicitent (Sodexo…) ; nous avons un enjeu à aller éduquer les TPE et PME.
Il ne faut plus que les gens aient peur : le Web 3, c’est une sorte de millefeuille technologique.
Facebook, avec Meta College, c’est une formation 100% online et 100% orientée sur leur metaverse, Horizon.
Metaverse College reste participatif et surtout ouvert sur tous les metaverses.
Comment vois-tu la place des NFT dans la vie des gens à échelle de 5 ans ? Dans celle des entreprises ?
Pas mal de boîtes ont déjà des NFT et des cryptos. Ce n’est pas si compliqué.
Binance a communiqué sur les chiffres suivants:
- Aujourd’hui il y a 400 Millions de wallets,
- en 2023 on passera à 1 milliard, soit +150% en moins de un an.
Il est certain que la super app va arriver pour favoriser la démocratisation des usages.
On voit que le Web 3 arrive dans nos vies de tous les jours : en juin 2022, au centre commercial de Beaugrenelle, j’ai acheté une paire de chaussures en cryptos pour ma fille.
Pendant mes vacances cet été, en Espagne, j’ai payé mon assurance en cryptos.
Dans deux ans tous les accès vont être simplifiés et désintermédiés. D’ailleurs, on peut se demander ce qu’il va advenir des notaires (...) ?
Côté entreprises, pleins d’activités économiques vont transiter par des NFT car c'est simple à créer, inaliénable, unique, et facilement transmissible.
Quels conseils donnerais-tu à une entreprise qui se lance dans le Web 3 ?
Ne ratez pas le TGV du metaverse : c’est maintenant qu’il faut monter.
Une entreprise ne peut pas aller dans le Web 3 comme ça : les gens pensent, agissent, consomment différemment versus le Web 2.
Que penses-tu des critiques sur le Web 3 ?
C’est top, cf Schopenhauer : ils sont contre et deviendront pour dans 5 ans/ Il faut les convaincre.
As-tu un message à faire passer ?
Rendez-vous ici et maintenant dans le metaverse.
Notre objectif chez WagmiTrends c’est de démocratiser le Web 3 et de décrypter cette révolution numérique : penses-tu que cela soit possible auprès de tous ?
Dans mon village, mon électricien a son wallet et se fait payer en cryptos. Je pense que tout le monde peut se lancer.
En 1997, quand je travaillais chez Alliance, un consultant de Mckinsey avait dit que tous les contrats seraient vendus via internet : il a été viré.
Je suis convaincu que les gens vont aller sur la metaverse comme ils sont allés sur Internet. Le mouvement est là, et sera là demain.
Je pense aussi que ça ira beaucoup plus vite que l’avènement d’Internet : le Web 3 va en moyenne 4 fois plus vite qu'Internet.
Il faudra également suivre la démocratisation des équipements avec des prix moins chers : l’arrivée des lunettes d’Apple par exemple programmées pour octobre.
Passons aux questions pop, quel est ton bouquin de chevet ?
Le samouraï virtuel de Neal Stephenson.
Ton film culte ?
Blade Runner
Ta série crush ?
Black Mirror