Influenceurs et réglementation
Décryptage
La proposition de loi portée par les députés Arthur Delaporte et Stéphane Vojetta a été adoptée à l’Assemblée nationale ce jeudi 30 mars.
Ce projet de loi vise à rendre les réseaux sociaux plus vertueux, et à protéger les consommateurs contre les risques liés à la promotion de produits et services trompeurs ou illégaux.
Rapide contextualisation
La proposition de loi adoptée le 30 mars à l'unanimité en première lecture entend réguler l'activité des influenceurs sur les réseaux sociaux, dont le public est souvent jeune, pour mieux lutter contre certaines dérives et arnaques diverses : incitation à la chirurgie esthétique ou à des investissements financiers, paris excessifs, promotions de contrefaçons (...).
En France, le nombre d'influenceurs actifs, en pleine expansion, est estimé à 150 000, notamment sur les principales plateformes que sont Youtube, Instagram, Tiktok ou encore Facebook et pèserait presqu’un milliard d’euros.
Pour les auteurs de la proposition de loi, seule une minorité d'entre eux très visible recourt à des pratiques abusives ou à des escroqueries mais leurs conséquences restent dévastatrices pour leurs abonnés/”followers”/victimes.
Les députés ont également adopté un article additionnel actualisant la loi « Enfants influenceurs » du 19 octobre 2020. Celui-ci élargit les obligations pesant sur l’exploitation de l’image des mineurs en ligne à l’ensemble des plateformes en ligne et non plus aux seules plateformes de partage vidéo (amendement CE107). A ce sujet, je te recommande un livre incroyable : Les enfants sont rois de Delphine de Vigan publié en 2022.
Ces pratiques nuisent également à l'immense majorité des influenceurs et des créateurs de contenus qui respectent les règles.
Focus sur le contenu réglementaire
👉Définition des influenceurs et des agents d’influenceurs
L’article 1er définit juridiquement l’influenceur commercial comme étant « toute personne physique ou morale qui qui mobilise sa notoriété pour communiquer au public par voie électronique des contenus visant à faire la promotion directement ou indirectement de biens, de services ou d’une cause quelconque, en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature dont la valeur est supérieure aux seuils fixés par décret, exerce l’activité d’influence commerciale par voie électronique. »
Concrètement, les influenceurs, leurs agents et les annonceurs devront passer des contrats écrits au-delà d'un certain montant, qui incluront certaines clauses obligatoires telles que : identité des parties, missions confiées, conditions de rémunération, soumission au droit français dès lors que sont visés des abonnés en France, par exemple.
👉L’encadrement de certaines pubs et des promotions
Les influenceurs se doivent de respecter le cadre légal sur la promotion des biens et des services et sur la publicité, en particulier la loi dite "EVIN" en matière d'alcool, de tabac et de vapotage et les règles concernant les médicaments, les dispositifs médicaux et les compléments alimentaires.
Idem pour les publicités relatives à la chirurgie et la médecine esthétique, à certains produits et services financiers (notamment dans le domaine des cryptos) et aux contrefaçons.
Autre exemple, les photos ou vidéos modifiées "visant à affiner ou à épaissir la silhouette ou à modifier l’apparence du visage" devront désormais contenir la mention "Images retouchées". Exit la jeune influenceuse de 24 ans qui fait de la pub pour une crème anti-ride sans mention ! (Mon retargetting aura une toute autre saveur !).
Sanctions et contrôles
Les influenceurs, qui violeraient les interdictions ou obligations posées par la proposition de loi, risqueront une peine de prison et de fortes amendes (pouvant aller jusqu'à 300 000 €) ainsi qu'une interdiction d'exercer.
L’Etat a même sorti un guide de bonne conduite à destinations des influenceurs et créateurs de contenus dispo ici.
Notons que les réseaux sociaux sont censés s'engager à collaborer avec l'État pour réguler le secteur de l'influence commerciale.
Enfin, le 24 mars dernier, le ministre de l'économie a annoncé la création d'une brigade de 15 agents dédiée au sein de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (de son petit nom DGCCRF 😅).
Et demain ?
Le Sénat doit désormais examiner et valider ce projet de loi.
L’ADAN (Association pour le développement des actifs numériques) souhaite aller un cran plus loin en souhaitant encadrer plus spécifiquement l’activité d’influence sur crypto-actifs. En ce qui concerne notamment la promotion de produits et services sur actifs numériques, soit, entre la présentation des performances et avantages des actifs numériques et les risques liés à ce type d’investissements.
Pour aller plus loin sur ce sujet réglementaire ➡ article de l'ADAN.